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Hélène de Montgeroult ou la Marquise dans la Révolution



C'est une compositrice pianiste française, née à Lyon en 1764 et décédée à Florence en 1836. Elle est issue de la noblesse de robe et de l'aristocratie de par son mariage avec un marquis.

Marquise, elle ne peut devenir artiste complète car les nobles n’ont pas le droit de travailler au XVIII -ème siècle mais elle est connue de réputation et ses salons très privés accueillent les grands musiciens de son époque.

Née Hélène de Nervo ( ou de Nervode), elle passe sa jeunesse à Paris où elle suit des cours de piano dispensés par de prestigieux professeurs.

Elle épouse en premières noces le Marquis de Montgeroult et le suit dans sa demeure, le château de Montgeroult situé dans le Val d’Oise. Elle se fait connaître en fréquentant les salons très courus de cette époque comme celui de Mme de Staël et celui de Mme de Genlis. Elle  n’exerçait que dans les salons et ne donnait aucun concert public.  

C’est le temps des heureuses rencontres, elle se noue d’amitié avec le violoniste Giovanni Viotti et la révolution vient bouleverser toute cette vie à jouer une musique traditionnelle, savante que Mozart et Haydn ont figée sur des notes absolues.

Hélène, par instinct s’en délivre et fait entendre un autre chant.






 La Révolution française et ses rebondissements


Durant cette période agitée où les Montgeroult sont partisans de l’instauration d’une monarchie constitutionnelle, Hélène participe au programme musical du théâtre de Louis XVIII puis du théâtre Feydeau dirigé par son ami Viotti.

En 1793, les Montgeroult accompagnent leurs amis ambassadeurs les Maret qui partaient prendre leurs fonctions à Naples, en Italie et leurs amis les Sémonville qui eux, partaient pour Istanbul. Ils sont arrêtés et molestés. Le marquis meurt des suites d’un emprisonnement sordide.  Les femmes et les enfants sont rudoyés et privés de leurs moyens élémentaires de défense. Ils parviennent cependant à s’échapper et à se mettre à l’abri. Ils tentent d’obtenir de l’aide. La marquise trouve protection auprès du ministre de France à Baden et restent en Allemagne pendant tout le temps des agitations politiques  jusqu’à ce qu’il leur soit octroyé le permis de rentrer en France.  

 En France, les insurrectionnistes confisquent les biens du Marquis.  Une anecdote raconte qu’Hélène parvient à échapper à la guillotine en improvisant des variations sur l’hymne de la Marseillaise.


La reconversion d’Hélène


Hélène se trouve sans ressources et essaie de restaurer sa fortune en donnant des concerts qui lui permettent de s’acheter un bien immobilier dans la campagne normande.

En 1795, elle a fils Aimé His de la Sale. Hélène se marie avec le père de l’enfant, Charles- Antoine His,  rédacteur au journal le Moniteur, Elle divorce de lui en 1802.

Le conservatoire de musique de Paris cherche un professeur de piano pour ses classes d’inscrits en études musicales. Hélène présente  sa candidature et est nommée professeur. Elle a été la première femme à enseigner dans une classe composée d’hommes au Conservatoire de Paris. Il faut attendre un demi-siècle avant  que ne se reproduise le même scénario !

Elle y enseigne pendant deux ans et demi et démissionne pour raisons de santé mais elle continue d’enseigner en privé, en rédigeant les notes d’un cours complet sur la pratique du piano forte ( achevé en 1810 ), un recueil rassemblant 114 études.

C’est un problème récurrent dans la vie d’Hélène que de souffrir  d’une santé fragile et qui lui fait se retirer dans les stations thermales pour soigner ses maladies.  

A partir de 1800, elle se met à publier ses compositions  et faire entendre sa technique comme elle le dit :

 «  Produire l’illusion du chant est mon idéal »


Il est dit que son style est visionnaire, qu’elle anticipe déjà le jeu de Chopin. En conservant la tradition Bach, elle annonce les grands romantiques, Chopin, Schumann, Liszt, Mendelssohn.

Elle se positionne entre Mozart et Chopin. Les critiques décèlent dans sa composition, des ornementations, des inflexions qui sont autant d’échos de Chopin et de Schumann.

La critique musicale actuelle dit qu’Hélène a jeté un pont entre l’univers de J.S. Bach et celui des Romantiques.

Elle publie des séries de 3 sonates.





Puis des nocturnes et des études.


 




Son art, ce sont ses amis qui en conçoivent le mieux l’étendue. Ce n’est pas  la virtuosité qui distingue  Hélène, c’est l’intériorité d’un chant intime qu’elle élève et révèle.

Elle réunit ses amis régulièrement et jouent pour eux en se faisant accompagner des musiciens de son époque comme Chérubini.

Elle consigne ses compositions dans un recueil particulier : " Le recueil du cours complet " qui rassemble pas moins de 114 études. Dans ce recueil, elle indique sa manière de conduire sa musique. La position des mains, le travail de la main droite qui chaloupe la mélodie, le travail de la main gauche qui maintient en sourdine le fond du rythme. C’est véritablement un enseignement.

De ses utilisations des trouvailles de niches, d’ornementations, elle présente le travail du musicien. Sa technique novatrice et révolutionnaire pour l’époque est annonciatrice de  Beethoven et des autres romantiques.

Le piano romantique était déjà présent à Paris sous la Révolution et ses soubresauts bien avant Chopin et Schumann. Sa musique reste à découvrir. Son répertoire est révolutionnaire car sans renoncer à la tradition, il avance vers le romantisme.

Elle incarne un moment avant-gardiste comme un éclair de clairvoyance sur le devenir de la musique de son époque. Les sonates d’Hélène sont avant-gardistes et seuls les amis de son salon et les salons qu’elle fréquentait en avaient eu la primeur.

« Elle faisait parler les touches. »
« C’est la meilleure pianiste de son temps. »
« Une musique inspirée, colorée, sortie de nulle part. » 

La Comtesse de Charnage


En 1820, elle épouse le Comte Edouard de Charnage, préfet et auteur de traités politiques, plus jeune qu’elle de quelques années.  

En 1826, son conjoint le Comte meurt dans un accident.

Elle part s’installer en Italie avec son fils et meurt à Florence en 1836. Sa tombe se situe à Florence dans le cloître de l’église Santa Croce.

C’est une des compositrices les plus importantes de la Révolution et de l’Empire. Cette constatation, cette prise de conscience fait que des concertistes intègrent dans leurs programmes les œuvres d’Hélène de Montgeroult.


Jérôme Dorival, musicien et historien a écrit une biographie d’Hélène, parue en 2007 aux éditions Symétrie sous le titre de :

 «  Hélène de Montgeroult , la Marquise et la Marseillaise » 

 C’est un  livre qui se lit comme un agréable roman où le quotidien  et  les habitudes de la compositrice sont narrés au point qu’Hélène nous apparaît comme une amie de cœur.


 En 2024, il écrit un autre livre intitulé :

« Le génie d’une compositrice » où il fait une analyse musicale savante destinée aux spécialistes, assortie cependant de commentaires éclairés pour les mélomanes. Le livre s’avère être l’étude de la vie d’Hélène, une femme musicienne sous l’Ancien Régime  car c’est une femme qui ouvre l’originalité et l’innovation dans l’histoire de la musique et n’est plus dans le sillage de l’avant-garde masculine.

Ginette Flora

Avril 2025

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