La tisseuse de féeries végétales
Marinette Cueco
(1934-2023)
C'est en automne, au temps des feuilles mortes, que cette magicienne des forêts s'en est allée... Le 18 octobre 2023, l'artiste Marinette Cueco s'est éteinte à Paris à l'âge de 89 ans.
Il aura fallu un dérèglement climatique et une prise de conscience, hélas tardive, des enjeux environnementaux, pour qu'enfin Marinette Cueco soit reconnue à sa juste valeur, une immense artiste en avance sur ses pairs, en avance sur son temps.
En témoignaient encore l’hiver dernier, ses installations monumentales ou ses feuilles d’herbiers présentées au Mamac à Nice, dans le cadre de l’exposition « Devenir fleur ». Autant de pièces hypnotiques réalisées à partir de feuillages, de pétales d’amandier, de camélia, de rose, de renoncule, de fils.
De ses balades, cette plasticienne rapportait feuillages, pétales de fleurs ou fils d’herbes qu’elle tressait, assemblait, collait. Une œuvre au plus près de la nature longtemps ignorée, désormais porteuse de tous les enjeux environnementaux.
Incroyable magicienne de la matière végétale qu’elle a, toute sa vie, collectionnée, sculptée, tressée, tissée, Marinette Cueco réalisa de délicats herbiers de pétales et de feuilles collectés au hasard de ses promenades. Jouant sur les couleurs autant que sur les formes, ces tableaux naturels dévoilent leur infinie richesse et leur diversité, d’une indicible poésie.
Feuilles, racines, tiges, pressées, séchées, sont posées dans le mouvement vers lequel le port de la plante a guidé l’artiste. En s’approchant, on distingue tous les détails qui signent leur identité botanique. Le profane les découvre, les adeptes de la teinture végétale les reconnaissent. De plus loin, c’est la symphonie des formes et des couleurs qui se dégage. L’ensemble se lit alors comme une grande partition où les plantes séchées tiennent lieu de notes de musique, mais au lieu de voir les signes et d’entendre les sons auxquels ils correspondent, on regarde des parties de plantes et surgissent alors à l’esprit des visions colorées de tissus chatoyants. Car les plantes rassemblées sont les sources des plus belles couleurs que l’être humain ait jamais appris à concocter pour en parer ses diverses productions textiles.
Avec cette Pénélope des temps modernes, c'est toute la nature végétale qui devient une formidable toile d’araignée.
Marinette Cueco tressant de la paille vers 1983 dans son atelier.
En 1991, elle déclare :
"Je ne jette rien : entre le sauvetage et l’épargne. C’est un relent de culture paysanne : donner une fonction à la moindre chose, généralement négligée, transformer même les déchets. Et puis, il y a les obsessions hivernales : la peur du froid, du mouvement, du dehors, la vie au ralenti, l’enfermement, l’engourdissement. Alors je répète des gestes obsessionnels : le tressage, l’enroulement, l’accumulation, la tresse, la tresse mise en pelotes."
Pelotes et toiles végétales que la tisseuse d'herbes présente lors de ses expositions.
Les entrelacs et les herbiers de Marinette Cueco.
Colette Alice
Janvier 2024
Mon Alice, magnifique découverte et quelle femme encore ! ..La vie se glisse partout ... merci à Toi, bises douces d'ici coton et cachemire (il fait trop trop froid !)❤️
Merci Alice pour cette découverte. Je regrette de ne pas avoir eu l'occasion de voir ses œuvres exposées. J'aime beaucoup ses installations poétiques.
Je ne connaissais pas Marinette Cueco. Voilà qui est fait ! Son travail est très intéressant et le portrait que tu dresses de cette artiste récemment disparue donne envie d'en découvrir un peu plus sur son œuvre et son histoire. Merci pour ce beau partage en ce début d'année, Colette ! ^^