Je me souviens
"Il faut qu'une porte soit ouverte ou fermée "*
Est-ce si simple une porte
Ouverte
Ou fermée
Peu importe sa matière
Fermée on sait
Mais ouverte
*Alfred de MUSSET
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Seule ta peau
Contre la mienne
Et le soleil au cœur
Et la nuit qui s'enfuit
Les portes sont factices
Les frontières aussi
Que reste-il de la haine
Quand l'amour s'en mêle
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Porte bien calfeutrée
Un hiver marrons chauds
Ronronne dans la cheminée
Murmures de la flamme
La quenouille d'un conte
File ses pages
Rêves emmitouflés
Tout doux dans son berceau
L'enfant s'endort
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Je me croyais seul
J'ai poussé la porte
Tu étais là
Dans la beauté première
D'une belle journée
Par la seule grâce d'un geste
Nous étions deux
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D'un poème
J'ai fracturé la porte
De ma prison
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Débordant sur le trottoir
L'étalage de tes richesses
Livres usagés
Brillant de mille lettres
C'est comme feuilleter les étoiles
Petit boutiquier des mots
Sans porte ni fenêtres
La vie ouverte
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La plage
Là où s'écrivent les marées
Et les châteaux de sable
Le sable n'a aucun souvenir
Que celui du temps qui passe
Et la trace de nos pas
Reflue jusqu'au néant
S'asseoir un instant
Attendre son destin
Ô ce mirage blond
Qui coule entre nos doigts
Châteaux encore
Que dessinent les mots
Quand la rose des sables
N'est que fleur de désert
Et les hommes vacances
Dans la vacance des jours
Roche rouillée
Nos idées s'effritent
Grains de sable nous-mêmes
Animaux désemparés
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Ainsi l'automne
Brume et îles rousses
Le promeneur des villes
Cherche des champignons
En vain
Parmi les fougères
Parmi les mousses
Le solitaire de pleine campagne
Trouvera son bonheur
Bolets joufflus
Et poêle à frire
D'autres iront
Pressant les vignes
Verres levés
Plaisirs de gorges
Et l'amitié qui réchauffe
Chanter le vent et les sarments
L'automne tranquille
Pousse mes pas sur les chemins
Arbres enflammés d'or
Et je songe
Aux écus du soleil
Engrangés pour l'hiver
Entre les pages de mes rêves
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Automne fauve
Le vent racle
Un reste d'été
Automne fauve
Où s'allonge novembre
Matelas craquant
Sous les semelles
Le flanc rouillé de l'aube
Traîne sa mélancolie
La journée s'ébauche
Entre soleil et pluie
Jusqu'au soir qui ronge
Les heures de l'après-midi
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Toujours sur le motif
Dans l'absolu coquelicot
D'un paysage de fantaisie
Ta douce silhouette
Je te rêve à l'ombrelle
Dans un chant de couleurs
Qu'efflore un pinceau
Les tourbillons d'un ciel
Au regard tournesol
Me chamboulent les sens
Un drap de plage blanche
Et toi belle odalisque
Orpheline d'un peintre
Oh goulue des arts
De ta toile tu m'interpelles
Pour un festin de tulle blanc
Jusqu'aux îles lointaines
Où l'or noir se dévêt
Ô femme tu me fascines
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Frappé d'orages
L'été s'écorne
Au vent d'automne
Le ciel étiolé
Décapé essoré
Lâche un trop plein d'eau
Des trombes exaltées
Embouent les terres
Brunissent les rivières
L'horizon englouti
Appelle à la trêve
D'un été indien
Et l'aube raccourcie
Sous un tapis de feuilles
Se calfeutre au jardin
**
Le cœur à marée basse
Dans un rade minable
Et l'ennui en partage
Sur le café trop chaud
Le temps part en fumée
Un patron météo
Râle sur tout ce gris
Une sirène passe
Hurlant son cri rouge
Faire tinter le comptoir
D'un trop plein de monnaie
Salut bonsoir
Des réverbères transits
Lui courbent l'échine
Jusqu'à sa chambre aride
Truffé de nostalgie
Son âme à genoux
Est presque moribonde
Ces êtres esseulés
Gribouillés de fatigue
Valent bien un poème
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Je souffre d'un baiser
Que tu ne m'as pas donné
Ce n'est qu'un souvenir
Qui hante ma mémoire
Je souffre de ta main
Que je n'ai pas saisie
J'aurais pu te sauver
D'une vie de travers
Je souffre de tes yeux
Qui sont restés fermés
Où sont tous les ciels clairs
Qu'ils renfermaient hier
Je souffre de te rater
Sur le quai d'une gare
Quel visage aurais-tu
Inconnue de ma vie
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Dans mes cheveux
Les mots du vent
Plaisir de s'aérer
Frissons de peau
Aux reflets de feuilles
Se perdre à méditer
Se retrouver limpide
Proche d'une source
Et de sa transparence
Le pied léger
Fragile et fier
D'aimer encore
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Visages de marbre
Regards de pierre*
Expression d'éternité
Dans la fente des siècles
Des mains habiles
Taillent des souvenirs
Ils ne sont plus rien
Qu'un rêve de marbre
Rescapé du passé
*expression empruntée à Irène Dubœuf
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Sous la pluie
Le silence grésille
C'est la vie parapluie
Musique concrète des choses
À l'envers des concerts
Qui crèvent les tympans
On voudrait savoir
Ce que pensent les arbres
Trempés jusqu'aux troncs
On taille ses oreilles
On attise ses sens
Trop tard il fait bruit
Marcel Faure
Janvier 2024
je vais me répéter ! Tant pis ! Merciiii ... magie totale !❤️
Très beau texte par lequel vous nous faîtes partager les saison, les sensations et les sentiments Une belle confession ! Merci