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Les Baux de Provence


Situé dans le massif des Alpilles, c’est un plateau de calcaire grisâtre perché à une altitude de 200 m, qui séduisit les premiers habitants. Depuis  le rude promontoire, ils avaient une vue circulaire sur les plaines et il n’y avait pas d’endroit plus sécurisant que l’éperon rocheux qui  les isola pendant des siècles, du néolithique  à la Renaissance.  

 C’est une situation qui leur assure une protection naturelle contre toute forme d’adversité. Le plateau devint une forteresse. Le lieu escarpé explique le nom, « Baux  » qui tire son origine de « baou » signifiant «  lieu escarpé » .  C’est  surtout un endroit où coulent généreusement des sources et des ruisseaux appelés "des gaudres" et agrémenté de grottes et de cavités naturelles offrant tous les avantages pour un établissement permanent.

 C’est ce que firent les hommes du néolithique. 


Au Moyen-âge, les seigneurs de Baux firent de leur fief un rocher de légendes.

Au XIème siècle, un fidèle de l'archevêque d'Arles reçut pour bons et loyaux services, une portion de terres, la vallée des Baux de Provence, son éperon rocheux et les garrigues alentour. Il fait construire un château, les pierres de la construction proviennent des carrières de calcaire blanc. Une enceinte de remparts fit de la bâtisse une forteresse inviolable.

Les seigneurs suivants contribuent à nourrir des récits qui font d'eux des héros farouches et de redoutables guerriers, rebelles, indomptables et prompts à la détente. Leur passe-temps favori est d'accumuler terres et honneurs. Leur renommée s'étend dans toute la Provence où leurs terres fortes de 79 villages et autres oppidums composent les terres baussenques c'est à dire les terres de la maison des Baux. Leur caractère sanguin fait le tour des chaumières. En ces temps-là, nul n'oserait se mesurer aux princes des Baux de Provence de sorte que le petit village de Baux devint une place-forte où se replier lors de rebellions  ou en cas de soulèvements quand les maisons de Baux et les maisons catalanes se défient à coups d'épées et de harangues que l'histoire rapporte avec force vivacité.

Ils se disaient descendre du mage Balthazar et leur blason arbore l'étoile de la Nativité qui a guidé les mages lors de leur voyage vers Bethléem. Ils se dotent d'une devise : " Au hasard, Balthazar ! ". L'écrivain Frédéric Mistral évoque la famille des Baux de Provence par ces mots :


" La première par son antique nom,

comme sa splendeur

des familles provençales

Race d'aiglons, jamais vassale

Qui de la pointe de ses ailes,

Effleura la crête de toutes les hauteurs . "


Les seigneurs prospérèrent ainsi de génération en génération pendant une bonne vingtaine d'années entre conflits larvés et guerres déclarées, de 1145 à 1162, se fourvoyant dans ce que l'histoire désigna comme " Les guerres baussenques".

Parmi les princes qui marquèrent cette première dynastie des Baux de Provence, on peut citer :

- Raymond de Baux qui s'efforça sa vie durant d'arracher le Comté de Provence à la convoitise du Comté de Barcelone.

- Raymond de Turenne qui se fit remarquer par ses constantes rébellions contre l'autorité royale, ce qui lui valut d'être condamné à mort. Mais levant une horde de brigands, il écuma la région en pillant et brûlant ce qu'il trouvait sur son passage.

- Alix des Baux est la dernière héritière. En 1426, elle meurt sans héritier. La lignée des Baux s'éteint. La mourante lègue ses biens à un parent Guillaume des Baux, duc d'Andria qui est plus réfléchi que la famille des Baux turbulente et ingérable.

Une crise de la succession s'ensuivit jusqu'à ce que les Baux échouent à René d'Anjou au terme de guerres incessantes.

En 1481, le fief est démantelé et rattaché au Royaume de France et devient une baronnie. Louis XI donne la baronnie au connétable de Montmorency, ami de François 1er qui introduit toute l'harmonie artistique du style italien dans la rocaille provençale.


Pendant toute cette période troublée, une culture de la paix et de l'amour se développe. Le château devient le lieu où se développe l'esprit courtois et le code d'honneur de la chevalerie que chantent les troubadours, les poètes et les conteurs qui reprennent sur leur lyre et leur galoubet les versets de l'âme provençale. Les arts apportent un souffle de paix, la poésie provençale connaît un véritable essor. Vers galants, danses lentes résonnent dans les salles du château. Chevauchées et veillées patientes et chaleureuses rythment la vie du fief des Baux de Provence.


Malheureusement, les guerres de religion viennent tout remettre en question. La famille Manville qui occupe le château est pointé du doigt comme étant de confession orthodoxe Richelieu, lassé par les assauts et les conflits fastidieux qui reprennent de plus belle, ordonne d'assiéger le château et de détruire les remparts et de vider la forteresse de ses armes de guerre. La citadelle se bat vaillamment pour faire honneur à sa réputation de ville inexpugnable. Pendant 27 jours, elle repousse les archets et les armées du Roi mais la cité est prise et passe sous le contrôle royal.

Le fief est donné aux princes de Grimaldi sous le titre de marquisat.  La seigneurie des Baux est donnée par Louis XIII en 1642 à Hercule Grimaldi, prince de Monaco. C’est un lien qui s’éteint à la Révolution lorsque les Grimaldi perdent le village. Mais le titre de Marquis des Baux est resté honorifique et un lien de coeur perdure entre les deux rochers.

La France ne rachète la province qu'en 1791. L'actuel Prince de Monaco et son héritier portent le titre de Marquis des Baux.

 

L'Ancien régime

 Au XVIIème siècle, le village a de plus en plus de difficultés à vivre de son  isolement. Ayant perdu et son rôle politique et sa puissance militaire, elle souffre de voir partir ses habitants vers la plaine plus lucrative. Les villageois délaissent la cité abrupte pour préférer s’établir en plaine.

Ainsi se crée « la ville basse »  par opposition à l’ancienne cité où ne vivent plus que quelques habitants.

 

Les temps modernes

 

Seuls Frédéric Mistral, Alphonse Daudet et quelques poètes parlent de cette période en termes mélancoliques et à les lire, on croit entendre claquer les seules ailes des aigles.

 Au XIXème siècle, en 1821,  le géologue Pierre Berthier découvre une roche rouge qu’il nomme la bauxite, dérivé du nom de la terre où il l’a trouvée. C’est un minéral permettant la production d’aluminium. L’activité des carrières de calcaire s’accroit pour permettre la construction de bâtiments de la ville.  

En 1945, le restaurant l'Oustau de Baumanière ouvre ses portes.

De 1971 à 1993, sur les instances du maire et ses infatigables recommandations, des poètes et des artistes viennent visiter la région et en parlent avec surprise et admiration. On redécouvre les Baux de Provence comme si on ouvrait les pages d'une légende.

 

Actuellement, le village est devenu un site touristique et vit des ressources de ses activités culturelles et des quelques attractions artisanales et artistiques qu'il propose au cours des saisons estivales. Visité par les peintres et les écrivains, le village tient sa renommée sur l'instigation de Louis Jou, l'artiste qui invita ses amis à venir visiter la cité.

Van Gogh, Picasso, Suarès ouvrirent la voie aux autres visiteurs. Des films ont été tournés, comme le testament d'Orphée de Jean Cocteau, en 1959.


Des musées ont vu le jour comme le musée Yves Brayer,

où sont présentées cette année, des oeuvres de peintres provençaux de la mouvance fauviste : "Les fauves provençaux" Cézanne, Seyssaud, Camoin, Lombard, Chabaud, Girieud, Verdilhan.


La fondation Louis Jou,

Louis Jou est un typographe, artiste-graveur et

spécialiste des techniques du livre, impression, reliure, peinture des lettres. Il entretient de solides amitiés avec les artistes de son époque dont André Suarès. Avec la guerre, il se refugie aux Baux où il possède une maison qu'il ne quittera plus. Il ouvre son atelier, publie ses gravures et invite ses amis à visiter les Baux où il meurt en 1968. II est enterré dans le petit cimetière où son ami Suarès l'a devancé.


Le musée des santons rassemble

les pièces de collection des santonniers de Provence.

Citons Campagna, Fouque, Carbonel... Les scènes de village et les anciennes coutumes provençales y sont reconstituées.



Le château des Seigneurs de Baux

est un château érigé au XIème siècle et occupé par les Seigneurs de Baux pendant deux siècles jusqu'à ce que des querelles et des guerres opposent les tenants des terres aux catalans qui revendiquèrent le sol. La résistance des Seigneurs des Baux et leurs sujets tient lieu d'épopée dans la mémoire provençale.

Au XVème siècle, les Baux sont rattachés aux comtés de Provence et récupérés par la couronne de France.

Le château est situé sur une barre rocheuse et fait penser à un vaisseau échoué sur la grève. Restauré, il est classé monument historique et fait partie du patrimoine architectural du plus beau des plus beaux villages de France.

Depuis le château, on a une vue circulaire sur le paysage provençal : la garrigue, les oliveraies, les Alpilles, les villages et plus loin, les flaques luisantes de la Méditerranée.



De grands noms de la gastronomie française

se firent connaître sur le Rocher .des Baux de Provence. L'Oustau de Baumanière est tenu par le chef Glenn Viel et son pâtissier Brandon Dehan.

L'Aupiho tenu par le chef Lieven Van Aken, propose une cuisine aux saveurs locales.


Les carrières de lumières

C'est un lieu qui projette des expositions. C'est dans ces carrières que le calcaire blanc a été extrait depuis des siècles pour construire le château et la cité. Faute de projet pour les redynamiser, les carrières sont fermées en 1935.

En 1975, la Société Gens d'images y crée la cathédrale d'images où sont projetées des images géantes sur les parois de la carrière, manifestation qui interpelle le tourisme, ce qui génère l'arrivée de milliers de visiteurs.

En 2011, la gestion de son espace est confiée à CulturesEspaces ce que conteste la société Cathédrale d'images, jetant les deux sociétés dans une guerre de procès.

En 2021, Culturespace réouvre les carrières et lance une série d'expositions des oeuvres des peintres de la Provence.


Les seigneurs de Baux n'ont pas fini de faire parler d'eux, de leurs terres auxquelles ils étaient sincèrement attachés. On y voit plus qu'une proportion belliqueuse à tout régenter à leur façon. C'est plutôt chez eux, une volonté de conserver un berceau de culture, un esprit de chevalerie qui leur est particulier, une sincère et fidèle tendresse pour un sol qu'ils ont longtemps cultivé et préservé de toute ingérence, une tenue de comportement sauvage mais courtoise.

Ginette Flora

Septembre 2024

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4 Comments


Je croyais bien connaître les Baux... eh bien non ! Merci Ginette pour ces découvertes 😍

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La Provence ne cessera jamais de nous surprendre !

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j'adore ce coin, ce bout du monde en lumière et les expos sont magnifiques, merci de ce voyage, Ginette ..."

Les seigneurs de Baux n'ont pas fini de faire parler d'eux, de leurs terres auxquelles ils étaient sincèrement attachés" ...je crois que c'est tellement vrai !

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J'ai adoré vivre les aventures des seigneurs des Baux de Provence !

Il y a tellement d'endroits fabuleux à voir encore ! C'est pour cela que j'ai mis en place l'onglet " Les villages de France " pour qu'on aille s'y promener !!

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