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René Prestat, le sculpteur sur bois

Dernière mise à jour : 22 mai


René Prestat est un sculpteur sur bois et mémorialiste, dépositaire de l'âme sylvestre.

L’ancien agriculteur est né en 1934 dans l’Aube, à  Chessy- les-Prés, à 180 kms au Sud-Est de Paris. Il est décédé en l'an 2020 dans un tragique accident.

 Né dans les pays des terres agricoles, il ne pensait pas devenir sculpteur même s'il dessine depuis son enfance et que ses dons en dessin sont encouragés par ses professeurs. Mais  il marche sur les brisées de ses parents qui lui enjoignent d’être agriculteur et de reprendre leur exploitation.

 Il obéit mais il enchâsse ses rêveries d’une écorce indestructible.

 Il attend d’être à la retraite, à l’âge de 57 ans, pour exprimer enfin ses talents et se réaliser par la voie d’une matière dont il est le patient modeleur, l’admirateur constant   et le maître d’œuvre  car il aborde le bois en ramassant et récupérant les souches, les copeaux, les grumes, tout ce qui est tombé, déraciné, éviscéré  et qui devient entre ses mains une sculpture, l’écrin unique de ses émotions.

Du bois mort, il en reconstitue la forêt ; de l’écorce, il modèle l’âme ; des branches, il dessine les vivants, les êtres féeriques, fabuleux et mythiques, il fait bondir les animaux, il fait revivre la végétation.

C’est parce qu’on lui demande de restaurer de vieilles pierres, de ranimer  les gargouilles des façades grêlées qu’il sent sa flamme se rallumer.

 La grâce l’atteint, c’est un coup au cœur. Il n’entendra plus son cœur autrement que par le crissement des sciures qu’il ramasse, les coups de son maillet et de ses outils sur le bois pétrifié, le frisson de la poussière farineuse qui s’effrite entre ses doigts, c’est pour lui une pulsion primitive.

 

C’est un  artiste autodidacte, c’est en écoutant son intuition, sa voix intérieure qu’il se penche sur le bois et le forme, l’apprivoise au gré de  ses vibrations quand il prend le pouls de l’aubier.

  La souche

 L’enfance, il l’a passée au village  avec l’église et la fontaine au centre, les troquets sur les bas-côtés et à perte de vue les champs  qu’il traversait pour arriver à sa maison.  Les gestes, les personnes, les paysans avec qui il a travaillé, il les a gravés sur le tronc.

 Il redonne une vie au bois tombé dans l’herbe.

 Les souches ne meurent pas, il leur fait dire qu’il a vécu auprès d’eux une vie simple et laborieuse du paysan attelé à ses tâches quotidiennes.


 Et son œuvre avance, semble se libérer et surgir des profondeurs, on l’appelle le sculpteur paysan.

 Il va vers tout ce qui vit, aux humains, aux animaux, aux plantes, il leur donne un domaine en hommage aux rêves qu’il a fait  auprès d’eux.



L'appel de la forêt (2009)

En 1990, il achète une vieille maison datant du XVIème siècle  « La Feulie » qu’il restaure complètement avec patience. Il la « retape » , lui donne une deuxième vie, il en fait un domaine où le four à pain, le colombier coexistent pour conserver les éléments permettant de vivifier la  mémoire et rappeler la vie d’un village de jadis.

 Il le termine en l’an 2000. Il lui a fallu une dizaine d’années de travail, de moments difficiles, d’obstacles à passer pour venir à bout de l'œuvre fantastique à laquelle il s’est attelé.


 Gigantesque, monumental, immense il lui faut de l’espace  et ses sculptures s’en ressentent.

 On est frappé par le volume de ses sculptures. D’une souche, il sort une  scène où la faune se livre à ses ébats,

 D’un tronc d’arbre,  il fait un village.

 Et quand il sculpte sur des planches, il lui faut adjoindre plusieurs planches pour former des panneaux illustrant des scènes de vie, des fragments de son passé, ses mémoires.

Il nous raconte sa vie, son burin qui toque c’est son rêve qui revient, son maillet qui cogne, c’est son désir  qui renaît, il révèle la vie dans la terre, il inscrit le mot spontané, la première humanité, le premier dessin du premier homme.


Les quatre saisons


 «  Chaque arbre  a une âme, la sculpture vous apprend à être humble, elle vous rappelle vite à l’ordre. » dit-il quand il sort de son mutisme pour devenir le véritable compagnon des humains.

On lui demande de restaurer et de rendre leur patine originelle aux bâtiments délabrés.  C’est ainsi que les vieilles façades reprennent vie, les gargouilles retrouvent leur grimaces et leur propension à s’esbaudir. Ainsi  d’antiques légendes réapparaissent.

 Le geste d’enfoncer son maillet avec précaution, d’user de son burin et de son maillet avec circonspection, de connaître l’endroit où  le gouge peut se placer sans briser les osselets fossilisés,  il le ressent jusqu’au fond de lui.

 Le rifloir, la râpe deviennent ses outils de  complicité inséparable. Entre l’homme et le bois s’instaurent des moments de pure joie.

 

 Son œuvre est grandiose.

 Il voit le processus de la vie en grand, c’est une longue gestation pour arriver à produire de vastes fresques où il écrit ses mémoires. Le travail commence sur une souche de noyer à l’état brut.

 Il choisit les arbres de sa région, pommier, platane, acacia, olivier mais le noyer reste sa matière favorite.

 Puis il scrute la matière et réfléchit sur la scène qui va en sortir.

 Les branches deviennent les bras et les longues chevelures des créatures sylvestres, dryades et sylphides qu’il recompose, semblent s’élancer hors de la souche  et c’est comme une danse qui s’opère,  la magie d’"un songe d’une nuit d’été."


 Les racines sont indomptables.  Il les utilise pour sculpter des bas reliefs. Les racines s’étendent, écrivent les épisodes de son histoire, des scènes complètes.

 C’est un voyage bucolique auquel il nous convie, il nous mène vers son pays,  ses origines et l’on se met à le suivre car en le voyant créer et redonner vie à son village, c’est aussi vers le sillage de notre village que nous nous mettons à suivre, notre enfance, nos premiers émois et nous reprenons la mélodieuse gamme des émotions éprouvées, que ce soit dans la joie ou dans la tristesse ou dans le rire d’événements cocasses qui nous reviennent.

Les gestes de la vie quotidienne y sont reproduits avec un  réalisme confondant.

 C’est une autre façon de lire des mémoires, voici ce que nous offre René Prestat.

 

 Il montre que l’écriture ne suffit pas, la sculpture est un aidant, un autre substrat qui apporte le mouvement vif, l’expression du visage et ce visage a des traits que nous revoyons avec candeur, c’était bien nous avec nos galoches, nos facéties dans les  meulons  de blé.


 Les grandes œuvres sont :

 

Le village  d’autrefois (2012-2013)

Les 7 pêchés capitaux, (2006)

Les chevaux, le cycle de la vie (2008)

L'appel de la forêt (2009)

Les panneaux des quatre saisons

Le départ

 

 Ses expositions sont très appréciées et très courues car l’homme est d’un abord  accueillant, facile d’accès, d’emblée nous prenant sous son aile empathique quand il ne retourne pas dans son abri sauvage.

 On venait le chercher dans son village, on lui montait un atelier où il exposait ses sculptures au salon de l’agriculture avec l’association des écrivains et artistes paysans.

 C’est au salon de l’agriculture de l’année  2005 que  Jacques Chirac accepte une sculpture que lui offre René Prestat.

 

 Voici un lien Internet qui est un dossier bien fourni et complet sur les sculptures de René Prestat et qui détaillent mieux les oeuvres du sculpteur.

Seuls quelques extraits d'images apparaissent dans mon texte.



La base du village d'autrefois (2012) Le départ


Ginette Flora

Mai 2024

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댓글 4개


Colette Kahn
Colette Kahn
5월 25일

Je suis impressionnée par la puissance des œuvres de ce sculpteur sur bois. Merci pour cette découverte, Ginette et bon week-end.

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답글 상대:

C'est comme s'il laisse la dryade mythologique parler pour nous !

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"dépositaire de l'âme sylvestre" Magnifique découverte, Ginette ...merci à toi ... j'adore !❤️

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Oh ... mais je suis bien contente de te savoir si émerveillée par la puissance de ce travail qui m'a complètement saisie !

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